La naissance du hashtag et son émergence

  • Aux USA

Si nous voulons déterminer une chronologie, nous pouvons dire que ce mouvement est né aux Etats-Unis en 2013 lorsque George Zimmerman fut relaxé alors qu’il avait tué son voisin Trayvon Martin un an auparavant. Pensant avoir en face de lui un délinquant, il tire sur ce garçon de 17 ans. C’est dans ces conditions que le hashtag a vu le jour. Créé par trois femmes indignées de voir que les choses ne changent pas, Alicia Garza, Patrisse Cullors et Opal Tometi lancent donc #BlackLivesMatter. Militantes dans plusieurs associations qui se battent pour le droit des Noirs mais surtout contre les inégalités, ces trois amies touchent énormément de personnes ainsi que des personnalités publiques comme Kanye West qui reprend le hashtag pour montrer son soutien au mouvement. A l’été 2014 suite à de nombreuses « bavures » policières comme la mort à Staten Island, (New-York) d’Eric Garner étranglé par un policier blanc alors qu’il avait dit qu’il n’arrivait plus à respirer, des manifestations se déroulent pour pointer du doigt cette énième injustice. Ensuite, toujours en août 2014, Johnetta Elzie est l’une des premières personnes à tweeter sur ce qui se déroulait à Ferguson et s’est imposée dans les débats en tweetant sur ce qu’elle voyait mais surtout sur ce qu’elle ressentait face à ces meurtres en masse de Noirs par les autorités publiques.


En 2014, le mouvement Black Lives Matter se déplace dans les manifestations à Ferguson après la mort de Mike Brown et d’Eric Garner. Cela permet de toucher le public nationalement avec la mise en scène des derniers instants de ces deux jeunes hommes par les manifestants qui brandissent les phrases “je ne sais plus respirer” ou encore “les mains en l’air” mais aussi par des personnalités artistiques, sportives et des représentants politiques.

Le mouvement prend encore de la vitesse en 2015 durant la campagne présidentielle lorsque des militants mettent en avant le manque d’intérêt des candidats démocrates (Hillary Clinton et Bernie Sanders) concernant la question raciale en faisant irruption sur les podiums. Le parti démocrate les écoute et les entends. C’est ainsi que les candidats ajoutent à leur agenda la lutte contre le racisme systémique. Mais nous pouvons aussi voir qu’au sein de la communauté noire ce militantisme dérange. Jim Clyburn, qui siège au Congrès et ancien militant et leader étudiant de la lutte pour les droits civiques en Caroline du Sud, nous dira que dans les années 50 et aujourd’hui ces mouvements apportent un certain malaise parce que tout le monde n’est pas d’accord avec ce qu’ils défendent. Il nous dira que le mouvement des droits civiques existe aux Etats-Unis depuis 1619 (date de début de l’esclavage aux USA), il y a ici une sorte de continuité avec le mouvement Black Lives Matter. Ce n’est pas nouveau mais comme dit l’écrivain Ta-Nehisi Coates, « la technologie fera la différence en ce qui concerne le nombre de personnes touchées tout en mettant en avant un sacré changement concernant la place des femmes dans ce combat ».

  • En France

Dès son arrivée en France, on ne parle déjà plus de Black Lives Matter comme étant un hashtag mais comme étant un mouvement. Alors que ce mouvement existe depuis 3 ans aux Etats-Unis, il n’arrive qu’en 2016 en France afin de soutenir les victimes de violences policières aux Etats-Unis bien que d’autres associations luttaient déjà contre les injustices commises par les forces de l’ordre. Mais c’est en juillet 2016 que l’on entendra encore plus parler de ce mouvement en France avec la mort d’Adama Traoré, tué par des gendarmes Blancs alors qu’il se faisait arrêter. C’est à ce moment là que les dénonciations des violences policières ont pris de l’ampleur, les manifestations ont accueillis plus de militants, on voulait être acteur dans une situation qu’on ne faisait que regarder auparavant puisqu’elle ne jouissait pas d’une telle visibilité. Une marche a donc été faite pour demander des explications sur la mort d’Adama mais aussi pour dénoncer les autres morts suite à des arrestations qui se sont déroulées en France. Plusieurs jours d’affrontement ont eu lieu lors de cette manifestations.
Cependant, en France, Black Lives Matter n’est pas juste un mouvement, il regroupe plusieurs associations comme “urgence, notre police assassine” qui existait déjà en France elles luttent contre les violences policières, font un travail de mémoire concernant la colonisation mais aussi l’esclavage et surtout contre la négrophobie. Le hashtag BlackLivesMatter est alors perçu comme un cri de ralliement.

Cependant, bien que ces associations existaient déjà avant l’apparition du hashtag et donc du mouvement BLM, nous pouvons nous demander pourquoi n’ont-elles pas eu le même impact?

Au delà du hashtag, une page Facebook a été créée pour mettre au courant toute personne qui veut bien entendre ce qui se passe en France et ailleurs en terme de racisme. En 2018, le mouvement Black Lives Matter France se bat toujours pour connaître la vérité sur la mort d’Adama Traoré. Après plusieurs autopsies et contre-autopsies, le verdict penche toujours en faveur des policiers alors que la contre-autopsie demandée par la famille Traoré montre des signes de violences. Créant donc deux groupes distincts c’est-à-dire ceux qui veulent croire la justice et la police et ceux qui soutiennent la famille du défunt en prenant en compte leur autopsie qui prouve qu’il y a eu violence.

Un comité a vu le jour entre temps : « vérité pour Adama » qui édite également des revues papiers où on peut découvrir des interviews mais aussi des reportages sur les violences policières, la négrophobie et tout ce qui entoure ce large problème qu’est le racisme. Un documentaire, des conférences de presse, des marches mais aussi des concerts ont été organisés pour soutenir la famille d’Adama Traoré dans leurs démarches pour que la vérité soit reconnue aux yeux de tous et que les policiers soient inquiétés pour leurs actes. Tous ces mouvements en France pointent également du doigt une justice à deux vitesses et prennent comme exemple l’affaire Benalla survenue durant l’été 2018 qui a profité de son « pouvoir » pour agresser des manifestants sans être inquiété pour autant tandis que la vérité sur la mort d’Adama Traoré n’a toujours pas été révélée. Le mouvement prend une plus grande importance avec la participation de personnalités politiques comme Benoît Hamon qui demandent une totale transparence sur ce qui s’est passé lors de l’arrestation d’Adama même si cela n’est pas forcément bien vu par les manifestants qui voient cela comme de la récupération politique.

Mais en France ce n’est pas la seule affaire de mort suite à des arrestations de personnes Noires par des policiers Blancs. La question du racisme est présente dans notre pays mais surtout dans nos institutions, celles qui nous représentent. Nous pouvons également parler de la mort de Zyed et Bouna tués dans un transformateur électriques alors qu’ils essayaient d’échapper aux policiers venus pour les arrêter à cause d’un appel d’un homme qui les accuse de voler. Tous les enfants présents lors de cette « battue » étaient mineurs. Ils étaient 8 au total, 6 ont été arrêtés et deux oubliés cachés dans le site EDF alors que les policiers savaient qu’ils étaient partis là-bas. S’ajoute à cela l’affaire Théo révélé sur Twitter qui a fait grand bruit sur les réseaux et dans les médias. Il est encore une fois question de violences policières mais avec viol et cette fois-ci Théo est encore en vie pour témoigner de ce qu’il a vécu. Lorsque François Hollande a rendu visite à Théo à l’hôpital, nous comprenons qu’il y a une fissure dans le système dans le sens où les représentants des institutions politiques n’étaient pas d’accord sur le sujet, certains ne croyaient pas la version de Théo alors que d’autres le soutenaient.

Plus récemment, en mars dernier, la twittosphère apprend qu’un père de famille de 31 ans, d’origine congolaise est dans le coma à l’hôpital suite à un arrêt cardiaque lors dans contrôle policier. Admis à l’hôpital dans la nuit du mercredi 27 au jeudi 28 mars, ce n’est que le vendredi que sa famille est prévenue de son état, les médecins veulent le débrancher tandis que la famille refuse considérant la situation étrange étant donné le lapse de temps qu’il y a eu entre son admission à l’hôpital et le moment où les proches ont été prévenu. De plus, les policiers expliquent tout en restant floues sur les raisons de l’interpellation, que vingt minutes après avoir interpellé Ange, ce dernier a ingurgité une substance inconnue et fut pris de convulsions. La mère d’Ange décide dans un premier temps de faire une première vidéo où elle explique la situation, qu’ils ne veulent pas que son fils soit débranché, exigeant la vérité et demandant aux gens de l’aider à comprendre et à faire propager la nouvelle. Après le décès de son fils, elle fera une nouvelle vidéo où elle explique la situation aux gens et demande à ne pas faire de conclusions hâtives sur la mort de son fils et de ne pas divulger de fausses informations en attendant que la justice ne révèle la vérité. Durant cette affaire de nombreuses personnalités publiques telles que des artistes, politiques et journalistes ont diffusés l’affaire en utilisant le #justicepourange. Finalement, l’autopsie démontra qu’Ange était en état d’ébriété et que la substance qu’il avait ingurgité était une vingtaine de grammes de cocaine. Cependant, le passé entre personne de couleur et la police étant particulièrement douloureux, bon nombre de gens doutent une fois de plus de la justice et considèrent que la vérité est une nouvelle fois cachée.

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