2éme partie

Corpus 1
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Instagram est le temple des commentaires et des émoticônes. La page des Suicide Girls n’y échappe pas, bien au contraire. On y voit en majorité des émoticônes à caractères sexuel, des langues, des bouches, des flammes, des pêches, des aubergines mais également des cœurs et des roses… En d’autres termes tout ce qui rappelle l’anatomie ou le désir. Presque la totalité des commentaires sont en anglais ou en espagnol. La lecture y est parfois amusante mais aussi choquante.

 

 

Un exemple de commentaire à caractère sexuel: « I would give you pregnant just knowing that I could massage your feet », certains sont très peu subtiles: «Baby your family must be chicken farmers?, cause you sure know how to raise a COCK!!!!:) » ou encore:«Nice tongue, I wish I could suck it.»

La plupart des commentaires restent basiques, comme des compliments sur le physique qui restent bienveillants et gentils. Cependant, on retrouve très peu de commentaire sur le côté artistique ou les tatouages.

Les commentaires sont aussi un lieu de débat et de critique. Les sujets sont par exemple la chirurgie esthétique ou la place des modèles dans cette communauté.  Certain, mais cela reste rare, désapprouvent le mouvement «Trying to study so that i could get a decent job to be a decent father to a someday-woman who I would be able to bring up as a person who would be able to study to get a decent job and not be an instagram/twitch/cam whore ;)»

On remarque bien que le principal reste la beauté féminine, tout tourne autour de leur physique.

On retrouve également des commentaires exotisants qui tendent donc à être raciste comme par exemple un commentaire sous la photo d’une femme métisse « Mmmmmmm chocolate….👅  ou” ; « Make suicide girls white again, fuck black shemales »

 

 

La principe des Suicide Girls est de montrer des femmes différentes aux looks atypiques, cependant on remarque une réticence quand cela devient de plus extrême. Beaucoup aiment les femmes dites  «trash» mais dès que cela sort de leur zone de confort cela se finit par des critiques. Ils aiment la différence mais il y a quand même des limites…

Certaines personnes sont très engagées dans le mouvement des Suicide Girls. Il y a beaucoup de connaisseurs qui défendent ardemment les modèles ou les valeurs de cette communauté . On trouve aussi de simple utilisateurs d’instagram qui regardent les photos pour la beauté des images et des corps, tout comme des personnes qui dévalorisent le mouvement en publiant des commentaires sulfureux et irrespectueux. Les commentaires illustrent donc un  public très hétérogène.

 

Corpus 2
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Les commentaires sont beaucoup moins nombreux car les imitatrices ont une faible visibilité par rapport aux Suicides Girls. La plupart du temps il n’y a aucun commentaire, sinon on retrouve surtout des compliments.

 

 

On retrouve également de véritables hopefulls qui vont avoir beaucoup plus de commentaires semblables aux Suicide Girls: donc des émoticônes salaces et des  compliments. Les hashtags les plus utilisés sont: #suicidegirlshopeful #alternativegirl #suicidegirls #girlswithpiercings. Dans ce corpus, on retrouve également beaucoup de photos qui n’ont rien à voir, les hashtags sont usurpés pour accroître la visibilité des comptes.

 

Richard Prince
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Mouvement sulfureux et attractif sur les réseau sociaux, il ne pouvait pas échapper au scandale. C’est en fait Richard Prince qui a fait  scandale en septembre 2014 après avoir exposé et vendu des photo de Suicide Girls à la galerie Gagosian, à New York. Il s’agissait de plusieurs impressions, des captures d’écran de différents comptes instagram, sous lesquels il avait laissé un commentaire. Ces photos « volées » on été mises à prix : 90 000 dollars (82 000 euros). Elles se sont très bien vendues, selon le site Vulture.

 

 

Suite à cela s’en est suivit de longs débats sur la réappropriation des images et donc des personnes sur les réseaux sociaux. Puis plusieurs modèles de ces photos ont réagit en vendant de nouveau leurs photos pour seulement 90 dollars pour ensuite verser l’argent à l’Electronic Frontier Foundation, une association de défense des libertés en ligne.

L’appropriation de l’art n’est pas un procédé nouveau, il a émergé avec la pop culture qui prône l’emprunt, la copie, l’altération intentionnelle d’images déjà existantes ou encore de ready made. Cela était utilisé pour dénoncer la société de consommation ou tout autre problème de société. Mais cela va plus loin avec internet. L’appropriation devient de plus en plus facile et néfaste à l’ère du numérique. Se réapproprier le visage de quelqu’un pour le vendre des millions de dollars sans son consentement pose question. Certes, ces personnes ont choisi de s’exposer sur les réseaux sociaux mais elles ne pensaient pas être utilisées à d’autres fins et sortir de ce cadre numérique, qui plus est avec les pseudos affichés et à la vue de tous. Leur image a été utilisée sans qu’elles aient un contrôle dessus.

D’autres questions émergent également: est-t-il normal de vendre quelque chose de présent sur les réseaux sociaux et donc d’accessible à tous à ce prix là? L’air du numérique devrait faciliter l’accès à l’art et dans cette situation, ce n’est pas le cas.
Richard Prince rend quelque chose d’accessible, inaccessible dans un certain sens. Voilà pourquoi les femmes concernées ont décidé de vendre leurs photos à un prix raisonnable.

L’artiste plaide le « fair use » (usage loyal à caractère transformatif) pour justifier la valeur artistique de son geste d’appropriation. On peut également parler de  ready made by mobile.
« Plus besoin d’avoir du talent, désormais il y a Instagram. Instagram et ses millions de photos, toutes récupérables grâce à une simple capture d’écran. Clairement, ce n’est pas de l’art mais une chose est sûre: c’est extrêmement lucratif. Et Richard Prince peut en témoigner. » Jade Toussay

Les Suicide Girls ne sont qu’un exemple médiatisé des réappropriations sur internet mais cette pratique est de plus en plus banalisée dans la vie quotidienne. Et ainsi de nombreuses images de personnes sont reprises tous les jours, ce qui peut créer des situations dramatiques.